Paysans des rizières, porteurs de bois ou vendeurs à la sauvette : leurs destins se croisent, pour dessiner une seule et même histoire, comme les pierres des légendaires temples d'Angkor. Un film intense, par le réalisateur de S21, la machine de mort khmère rouge, inlassable interrogateur de la mémoire cambodgienne.Un jeune adolescent khmer s'interroge sur son avenir. Passionné par l'histoire d'Angkor, il voudrait devenir guide mais est trop pauvre pour aller à l'école. Des anciens répondent à ses questions : que signifient les dessins gravés dans les pierres d'un temple en ruine ? Comment calmer sa rage contre des parents qui l'ont abandonné ? Comment subvenir à ses besoins de façon honnête ? Grâce aux mythes racontés par les anciens, l'adolescent voit ses peines s'estomper et son espoir renaître. Un paysan devenu ouvrier des chantiers, quant à lui, se sent amputé de sa terre mais garde foi en la rizière. Un autre chérit son coq de combat, sur lequel reposent tous ses espoirs. Un groupe d'ouvriers assemblant les bas-reliefs d'un temple est fasciné par les dessins des vieilles pierres... Passé et présent s'entremêlent, divin et humain se complètent. L'humour permet d'exprimer l'angoisse de la survie quotidienne et l'art ancien de trouver des raisons de vivre.Au coeur de la mémoire cambodgienneÀ travers des documentaires bouleversants, comme La terre des âmes errantes, primé dans le monde entier, ou encore S21, la machine de mort khmère rouge, film sur la mécanique totalitaire sélectionné à Cannes en 2003, Rithy Panh n'a de cesse de revisiter l'histoire récente et tragique de son pays. Avec Les gens d'Angkor, le réalisateur continue d'interroger la mémoire cambodgienne, avec la même force et la même originalité. Par un travail obstiné, qui insiste cette fois sur les regards intenses plutôt que sur les paroles, il tente de restaurer la conscience d'un pays meurtri. Sans commentaire, loin du reportage classique avec sa rituelle voix off, Rithy Panh choisit de nous faire découvrir Angkor à travers les yeux de ses habitants. Le cinéaste sait se faire oublier. Ainsi le spectateur se sent-il plus proche des gens, dont il partage les coutumes, les peines, les espoirs. Le fil conducteur, les interrogations pressantes et personnelles des habitants d'Angkor, nous permet de mieux comprendre l'état d'esprit de la société cambodgienne d'aujourd'hui, de mieux saisir l'atmosphère mystique d'un lieu où les destins des divinités et des ouvriers se croisent et se répondent.